vendredi, octobre 05, 2007

Allez, tous en scène!


par SOLANGE BERGER
- - - - - - - - - - -

Né au Canada, le théâtre en entreprise séduit de plus en plus de sociétés chez nous.
Il permet notamment de faire passer plus facilement certains messages.

Elle n'en dort plus depuis des semaines et patiente devant la porte de son patron. L'heure du rendez-vous approche. Son stress augmente. Aujourd'hui, c'est le jour de son entretien d'évaluation. La porte s'ouvre. «Asseyez-vous», lui répond d'un air distrait le patron en pleine conversation téléphonique. Le stress continue à monter... Le combiné déposé, le patron lui demande: « C'est pour quoi?»; «Mais, mon entretien d'évaluation...». «Ah oui!, on ne peut pas remettre cela à plus tard?» Gloups. Et la jeune femme de revenir plus tard, pour un entretien qui ne se passe pas spécialement comme elle l'aurait souhaité. La scène ici est jouée par des acteurs. Sur le ton humoristique et caricatural. Mais elle pourrait bien être réelle.

Autre scène: un directeur de supermarché, de bonne humeur, félicite son chef de rayon pour la belle présentation des fruits et légumes qu'il a réalisée. Le chef félicite à son tour sa vendeuse qui, aux anges, accueille le client avec le sourire. Un client satisfait, qui reviendra. De mauvaise humeur, le directeur repasse, le lendemain, devant le même rayon, convoquer le responsable: «Quelle perte de temps pour arranger tout ceci!» Le responsable à son tour passe un savon à sa vendeuse qui, de très mauvaise humeur, agresse le client. Un client peu satisfait, qui ne reviendra pas.

En exagérant, en jouant sur les différents caractères et en privilégiant l'humour, le théâtre d'entreprise permet parfois de faire passer bien mieux certains messages. La caricature a un effet révélateur.

Tout un scénario

«Pour répondre à une demande précise d'un client, nous travaillons en plusieurs points», explique Kevin Van Nuffel, un peu l'homme à tout faire (acteur, scénariste, développeur,...).
« Le premier point est la collecte d'informations. Une fois décidés la durée de la saynète et le nombre d'acteurs, le scénariste se renseigne sur le public cible, le message que l'entreprise souhaite faire passer,... Il va aussi prendre contact avec les différentes personnes du public cible pour voir quelle est une journée type, le vocabulaire qu'elles utilisent, ce qu'elles aiment ou n'aiment pas dans leur métier...»

Sur base de ces informations, le scénariste écrit son scénario. Celui-ci est ensuite validé par le client. «Il enlève parfois certaines phrases qui pourraient choquer les collaborateurs de l'entreprise », explique Kevin Van Nuffel.

Viennent ensuite l'étape de la répétition et puis celle de la répétition générale devant le client. «Il est là, non plus pour valider le fond mais la forme. Juger la manière dont les comédiens jouent et leurs accessoires par exemple. Ainsi, parfois, il demande à un acteur de ne pas mettre telle perruque parce qu'ainsi, il ressemble trop à un des secrétaires qui pourrait être vexé; ou au contraire, de porter telle cravate pour accentuer la ressemblance avec un directeur.»

Dernières étapes, mais combien importantes: la représentation et l'évaluation.

Si les sociétés spécialisées dans le théâtre d'entreprise travaillent avec des acteurs professionnels pour faire passer des messages au sein des entreprises, les propres collaborateurs de l'entreprise peuvent devenir acteurs. « Ils jouent et font passer un message entre eux», explique Kevin Van Nuffel. Le théâtre permet ainsi de vaincre ses inhibitions et de parler de certaines choses et aborder certains problèmes sur un autre ton.

Lors de ces workshops, les collaborateurs sont divisés en plusieurs groupes, chacun ayant un accompagnateur. « Dans un premier temps, il y a débat entre les membres du groupe sur ce que signifie, par exemple, pour chacun telle ou telle valeur», explique Kevin Van Nuffel. «Sur base de ce qui a été dit, l'accompagnateur leur demande ce qu'ils ont envie de communiquer aux autres groupes. Ils élaborent alors un scénario, mais non écrit - il n'y a rien à apprendre par coeur et l'improvisation a sa place. Et puis répètent cette scène. Ce travail prend environ trois heures.» Suit la représentation devant tous les autres groupes. «Quand les gens jouent, un fois passé le cap de la timidité, cela peut devenir très intéressant...»

© La Libre Belgique 2006

Aucun commentaire: